
René Déjardin en 1992, à son retour du Sommet de la Terre à Rio de Janeiro, auquel il avait participé au titre des ONG.- Photo archive © PVC
Le maire, René Hocq, en parle régulièrement. Sa signature s’étale sur la façade de la salle du faubourg qui porte son nom. Mais qui était René Déjardin ? Prêtre, ouvrier, syndicaliste CGT, militant communiste. Un homme pas comme les autres ? Pas vraiment. Plutôt un homme de conviction au parcours atypique qui fait l’objet d’un livre signé de l’historien Jean-Louis Remy, sorti en librairie il y a quelques semaines.
René Déjardin est mort en août 1997… Anniversaire souligné par la sortie d’un livre. Deux bonnes raisons pour parler de lui et de comprendre la démarche qu’il a initiée et qui est encore aujourd’hui, le fil conducteur des élus de la commune de Burbure. Pour cela, la municipalité organise une rencontre-dédicace avec l’historien-doctorant Jean-Louis Remy, l’auteur de René Déjardin, prêtre ouvrier à la CGT. Rencontre à laquelle participeront quelques-uns des témoins de l’action du prêtre-ouvrier. Façon sans doute de se ressourcer au moment où l’action politique et syndicale est en perte de repères.
Vingt cartons dans les archives
Champenois d’origine, issu d’une famille de vignerons, de sensibilité catholique, Jean-Louis Remy dit être « ouvert aux autres et à d’autres milieux que le sien ». Professeur d’histoire géographie à Wattrelos, c’est en reprenant des études pour un master de recherches historiques, sous la direction de Guillaume Cuchet, professeur d’histoire religieuse contemporaine, qu’il a appris que les prêtres ouvriers avaient déposé leurs archives à Roubaix aux archives du monde du travail. « Ce qui m’intéresse au départ, explique l’auteur, c’est de traiter trois aspects à la fois : l’histoire religieuse, l’histoire sociale, l’histoire politique ».
Avec vingt cartons de notes, de cahiers, de textes, de coupures de presse, etc, René Déjardin est sans doute le prêtre-ouvrier qui a laissé le plus de documents dans les archives roubaisiennes. « Il m’a fallu plus d’une année pour en venir à bout », poursuit le chercheur qui a publié deux mémoires.
Vocation de missionnaire
Pour lui qui ne connaissait absolument rien au peuple de la mine, la première surprise a été de constater que les mineurs n’étaient pas aussi déchristianisés qu’on le dit. René Déjardin dont la vocation religieuse a été précoce (il avait 9 ans) en est l’illustration parfaite, lui le fils de mineur, né à Burbure, habitant du faubourg, quartier tout proche de la fosse de Rimbert. Ce qui marque c’est le choix qu’il a fait de rejoindre les rédemptoristes (noviciat à Mouscron) qui forment davantage des missionnaires que des prêtres de paroisse. René Déjardin aurait ainsi pu aller en Afrique (il y a pensé) mais c’est au sein du monde ouvrier qu’il a décidé de vivre et de partager sa foi.
Prêtre et ouvrier-coffreur
Résidant dans la paroisse de Calonne-Liévin tout en étant ouvrier-coffreur dans une entreprise de travaux publics, René Déjardin a pris fait et cause pour l’ouvrier… Les ouvriers, français et étrangers, trop souvent sacrifiés sur l’autel du profit. Lui, le prêtre, est devenu syndicaliste, au sein de la CGT, militant avant de prendre des responsabilités à Paris, comme permanent… sans jamais se couper du terrain et des ses amis, à Liévin, à Burbure et ailleurs. Quittant Liévin où il était conseiller municipal sur une liste d’Union de la gauche qui ne répondait pas à ses aspirations, René Déjardin s’est installé à Paris par obligation. Il y a beaucoup travaillé dans le domaine du logement social, siégeant dans les organismes paritaires qui géraient le 1% logement payé par les entreprises et côtoyant à ce titre de nombreuses personnalités comme les ministres Quilliot et Quilès…
Au service de Burbure
Cette expérience acquise sur le terrain et dans les hautes sphères parisiennes, l’homme l’a mise au service de sa commune de Burbure… Même à Paris tout le monde savait qu’il était de Burbure. Encarté au PC, revenant tous les week-ends dans la maison familiale du faubourg qu’il avait héritée, il s’est tout naturellement retrouvé sur la liste conduite par René Hocq en 1989, les deux hommes ayant fait connaissance quelques mois plus tôt. L’action du binôme et de toute l’équipe municipale (la liste entière avait été élue) a alors progressivement – mais radicalement – changé le visage de Burbure où il y avait beaucoup à faire en matière de santé, de logement et d’environnement, son autre cheval de bataille qui l’a d’ailleurs amené à participer au sommet de la Terre en 1992 à Rio de Janeiro.
Le remplacement du réseau d’adduction d’eau potable, le rachat du terril, la fermeture et la suppression de la décharge, le parc de logements sociaux (au sens noble du terme), etc. René Déjardin y a été pour quelque chose
Homme de fidélité
S’il est un mot qui pourrait caractériser René Déjardin, c’est peut-être fidélité. Car il est toujours resté fidèle à l’Église, à la CGT, au Parti communiste, à ses amis, à sa famille, à ses proches, à ses engagements… et cela en dépit des doutes, des interrogations, des souffrances aussi qu’il a pu connaître. « On ne l’aurait pas fait douter », dit de lui Jean-Louis Remy qui, au regard de l’histoire, nous éclaire sur l’action de l’homme public, du prêtre, du militant. Reste que c’était un homme de tempérament, de cœur, jovial, qui durant toute sa vie a semé la fraternité. C’est sans doute aussi cela que voudront exprimer ses proches, présents ce samedi 9 décembre pour un moment de partage fait de rencontres, de témoignages, d’échanges et de chansons… pour continuer à marcher ensemble dans ses pas.
Samedi 9 décembre à 15h, salle René-Déjardin, au faubourg (près du château d’eau).
René Dejardin, Prêtre et ouvrier à la CGT, par Jean-Louis Remy, aux éditions Karthala.
280 pages sous couverture. Prix public : 25 €. ISBN : 978-2-8111-1877-8